Métiers de la merranderie #2 – Tronçonner avant de façonner !
17 octobre 2024En 1928, après huit générations d’activité en forêt, Eugène Charlois installe un atelier de fendeurs à Murlin : Maison Charlois.
Après la sélection des chênes en forêt par les acheteurs de Charlois, l’acte le plus important dans le travail du chêne à merrain, c’est la fente du bois. Un savoir-faire ancestral, une technique traditionnelle. Des métiers qui ne s’apprennent pas, mais qui se transmettent de génération en génération, comme ce fut le cas chez les Charlois. Un merrandier, c’est un œil infaillible pour bien lire le fil du bois, fendre le billon en quartiers, éliminer le cœur, l’aubier et l’écorce pour façonner du merrain de droit-fil. L’assurance d’une barrique étanche. Les étapes se suivent et ne se ressemblent pas. Depuis le parc où sont réceptionnées les grumes, chaque jour, jusqu’à l’empilage des merrains sur les parcs d’affinage, plusieurs phases se succèdent : le cubage, le tronçonnage, la fente, le sciage, le délignage, le tri, le contrôle et l’empilage. C’est tout cela la merranderie.
Tronçonner avant de façonner !
Il y a tronçonner et tronçonner. Sur le parc à grumes, une première sélection est opérée à la tronçonneuse. Les sections de grumes de qualités inférieures à la qualité merrain sont débitées puis expédiées aux Ateliers du Chêne à Saint-Martin-du-Puy où elles seront valorisées en bois sous rail, bois de charpente ou de construction.
Une fois l’étape de tronçonnage sur parc terminée, les grumes de chêne à merrain sont déposées par la chargeuse sur des rails qui les mènent sur un tapis avant d’être tronçonnées en billons. Aux manettes, le tronçonneur. Première chose, scanner la grume et enregistrer les données (date, cubage, traçabilité, etc…). Une fois la grume en place, le tronçonneur va tout d’abord découper le pied de bille (aussi appelé coqueron qui sera valorisé ensuite en combustibles, en panneaux d’aggloméré…). De loin, ça a l’air facile. Il suffit d’appuyer sur un bouton pour que la lame de la tronçonneuse vienne découper la grume en plusieurs billons. Dans les faits, c’est un peu plus complexe, un peu plus précis, un peu plus stratégique. La découpe se fait au millimètre sur les traits de coupe marqués par le cubeur lors du passage sur le parc. Chaque grume est tronçonnée en plusieurs billons. La sélection faite au préalable sur le parc fait que, à partir de l’étape de tronçonnage, on travaille du bois de qualité merrain, mais il reste encore un certain nombre d’étapes avant d’arriver à la douelle qui sera utilisée par les tonneliers.
Le tronçonneur donne le rythme en merranderie, à l’instar d’un chef d’orchestre. C’est lui qui va alimenter chaque poste de fente, chaque fendeur en veillant à répartir équitablement les billons de chêne et à ne pas surcharger les espaces de travail. Ce qui, en termes de sécurité, nécessite une grande attention de la part du tronçonneur. La merranderie, c’est un travail d’équipe, chaque poste alimente le suivant, du parc à grumes au parc d’affinage du merrain.
Photographies © Christophe Deschanel