Patrick Donzé, chef de production chez Maison Charlois, raconté par Stéphane Ebel
2 août 2019L’HOMME DE MURLIN !
S’il en est un qui connaît la Maison Charlois, c’est bien lui. Patrick Donzé, 57 ans, est le chef de production du site de Murlin. Sa mission, veiller au bon déroulement des opérations successives de transformation des grumes en merrains.
Le portable toujours à portée de main. Il a bien fallu s’y mettre. L’homme est plutôt discret et modeste. Lorsqu’on lui propose le poste de chef de production, en 2012, l’une de ses premières pensées fut « Pourquoi moi ? ». Sans doute parce que Patrick connaît la maison mieux que personne, et que sur le site, il fut tour à tour scieur, fendeur, trieur, déligneur, cariste puis affûteur, « le poste clé » précise Patrick : « sans une lame de scie bien affûtée, c’est toute la chaîne de production qui est impactée. Le scieur décide de la cadence. Une responsabilité qui peut générer un certain stress ».
La merranderie, c’est un peu sa seconde maison. « J’ai vécu à Murlin de l’âge de 12 ans à 18 ans. Avec mes parents on logeait dans le presbytère. De ma fenêtre, je voyais les gars bosser dans la merranderie. À l’époque, ils n’étaient que trois. Il m’arrivait d’aller casser la croûte avec eux le mercredi matin, je m’en souviens comme si c’était hier ». Bien que baigné par les effluves des grumes, c’est vers la taille de pierres que Patrick s’oriente. Un apprentissage chez Serge Fontaneto, sur les hauteurs de Murlin. CAP en poche, il part pour l’armée avec la promesse d’un avenir professionnel dans la région lyonnaise. Mais le destin en décida autrement. Le décès accidentel de son patron, laissera Patrick sans emploi. Il décroche un job de livreur pour les boulangeries des villages et hameaux aux alentours de Murlin. 7 jours sur 7. Puis une expérience sur Paris qui ne lui laissera pas un bon souvenir. Lui, le gars du cru, élevé au milieu des Bertranges, frappe à la porte de la maison Charlois par l’intermédiaire d’une connaissance. « Qu’il vienne lundi ! » avait alors dit Denis Charlois. C’était en 1990, il y a 30 ans.
En plus de connaître la maison, il connaît la famille, c’est un peu comme s’il en faisait partie. Denis, le père, Lionel, Xavier, Romain et bien sûr Sylvain, les fils. Les valeurs et les principes de la maison, il les porte en lui et se fait fort de les véhiculer et de les transmettre. De la merranderie à la « GreCon » (scie automatique à lecture optique qui sert à redimensionner les merrains en les débarrassant des défauts repérés à la craie luminescente par les trieurs. Ces merrains, trop courts pour faire des douelles, serviront pour confectionner les fonds des barriques), Patrick inspire le respect. Dans son bureau, installé dans l’atelier d’affûtage (ça ne s’invente pas), il n’y pas d’ordinateur. Il fait le point, gère, anticipe. En qualité de chef de production, il veille à ce que tous les postes soient pourvus, qu’il ne manque personne à l’appel. « C’est sûr que le métier est physique. Il faut être courageux, travailler proprement, prendre soin des machines… » et des hommes et des femmes qu’il a, pour la plupart, recrutés et formés. Et s’il faut donner la main, c’est avec plaisir et conviction qu’il le fait. Ni contraint, ni forcé. « J’aime ça » assure l’intéressé. Les gars partis, il fait à nouveau le tour du propriétaire, emmène les palettes de merrains sur le parc à bois, range un truc par-ci, un autre par-là ! « Le site doit-être propre, c’est l’image de la Maison ! ».
3 questions à Patrick :
– Après 30 années passées dans le groupe, quel est votre regard ?
Le groupe a considérablement évolué. C’est indéniable. À Murlin, nous sommes plus de 80, alors qu’il y a 30 ans, nous étions une dizaine à peine. Mais les valeurs sont restées les mêmes. Il y a un esprit « famille », tout le monde se connaît.
– Et sur votre parcours ?
J’ai envie de dire que j’ai eu de la chance. J’aime mon travail, j’aime le travail bien fait. En 30 ans, je suis quasiment passé par tous les postes de la production. Mais, si on m’avait dit en rentrant chez Charlois que je finirai cadre… Preuve que la Maison fait confiance à ses employés. Et ça, c’est motivant pour tout le monde.
– Vous êtes maintenant chef de production, quel est votre rôle exactement ?
C’est vaste. Je gère le personnel en lien avec les RH. C’est une grosse partie de mon travail. Je commence ma journée par dire bonjour à tout le monde et voir si tout le monde est à son poste. Si ce n’est pas le cas, et bien il faut faire en sorte que ça tourne. Les équipes sont faites pour palier à des absences éventuelles. Et puis il y a un tas de choses à faire. Vérifier les machines, organiser, recruter, former, veiller à l’hygiène, la sécurité, la formation des équipes, améliorer les postes de travail lorsqu’ils peuvent ou doivent l’être…. Et être à l’écoute !
Photos : Christophe Deschanel