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Arbres et forêts dans les arts

Aux Arbres de Victor Hugo

25 mars 2021

Dans son recueil Les Contemplations, le lyrisme de Victor Hugo se construit à la faveur de constantes références à la nature. L’auteur consacre par exemple un poème Aux Arbres de la forêt qu’il personnifie et auxquels il s’identifie finalement peut-être plus qu’à ses semblables. Hugo conclut cet hymne à la forêt en exprimant son désir d’être enterré « dans [son] ombre et dans [son] mystère », loin de la civilisation et dans l’anonymat. Un lieu de sépulture en marge de la société qui fait notamment écho aux longues années d’exil de l’auteur à Jersey, puis Guernesey…

Un poème à lire et relire à l’ombre d’un « branchage auguste et solitaire » !

 

« Arbres de la forêt, vous connaissez mon âme !

Au gré des envieux la foule loue et blâme ;

Vous me connaissez, vous ! – vous m’avez vu souvent,

Seul dans vos profondeurs, regardant et rêvant.

Vous le savez, la pierre où court un scarabée,

Une humble goutte d’eau de fleur en fleur tombée,

Un nuage, un oiseau, m’occupent tout un jour.

La contemplation m’emplit le cœur d’amour.

Vous m’avez vu cent fois, dans la vallée obscure,

Avec ces mots que dit l’esprit à la nature,

Questionner tout bas vos rameaux palpitants,

Et du même regard poursuivre en même temps,

Pensif, le front baissé, l’œil dans l’herbe profonde,

L’étude d’un atome et l’étude du monde.

Attentif à vos bruits qui parlent tous un peu,

Arbres, vous m’avez vu fuir l’homme et chercher Dieu !

Feuilles qui tressaillez à la pointe des branches,

Clairières, vallons verts, déserts sombres et doux,

Vous savez que je suis calme et pur comme vous.

Comme au ciel vos parfums, mon culte à Dieu s’élance,

Et je suis plein d’oubli comme vous de silence !

La haine sur mon nom répand en vain son fiel ;

Toujours, – je vous atteste, ô bois aimés du ciel ! –

J’ai chassé loin de moi toute pensée amère,

Et mon cœur est encor tel que le fit ma mère !

 

Arbres de ces grands bois qui frissonnez toujours,

Je vous aime, et vous, lierre au seuil des antres sourds,

Ravins où l’on entend filtrer les sources vives,

Buissons que les oiseaux pillent, joyeux convives !

Quand je suis parmi vous, arbres de ces grands bois

Dans tout ce qui m’entoure et me cache à la fois,

Dans votre solitude où je rentre en moi-même,

Je sens quelqu’un de grand qui m’écoute et qui m’aime !

 

Aussi, taillis sacrés où Dieu même apparaît,

Arbres religieux, chênes, mousses, forêt,

Forêt ! c’est dans votre ombre et dans votre mystère,

C’est sous votre branchage auguste et solitaire,

Que je veux abriter mon sépulcre ignoré

Et que je veux dormir quand je m’endormirai. »

 

 

Visuel : Dessin de Victor Hugo représentant un massif d’arbres, intitulé Nox, 1847 © D.R.

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